Dans le dernier billet rédigé, j'analysais le film de John Chu, Never Say Never. Film idéologique autrement dit film de propagande. L'occasion pour ce nouveau billet de revenir sur le mot même de propagande car toute analyse reposant sur de telles notions mérite un éclaircissement des-dites notions et donc, comme point de départ, un recours à l'étymologie des mots utilisés.

 

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L'affiche du film, Le Juif Süss

 

Le mot « propagande » vient du latin propaganda. Si l'on se réfère au wiktionary, voici la définition qu'on y trouve : « Le mot a connu une diffusion universelle du fait du nom latin d'une branche du Saint-Office, Congregatio de propaganda fide ou « congrégation pour la propagation de la foi » (très exactement : « congrégation á propos de la foi comme devant être propagée »), un comité de cardinaux établi en 1622, par Grégoire XV, pour superviser les activités missionnaires de l'Église catholique romaine. Le gérondif a été adopté et substantivé tel-quel dans les langues vernaculaires des peuples catholiques, pour en faire le synonyme de propagatio ; il n'a pris un sens péjoratif, dans la plupart de ces langues, qu'à partir de la Première Guerre mondiale, avec un sens politique ».

 

Que retenir ? Que la propagande provient d'un mouvement religieux, que son but est de propager la foi et qu'il prendra son sens négatif, dans l'imaginaire populaire, après la première guerre mondiale. Bref, en soi, la propagande c'est propager une parole. La connotation péjorative ne provenant que du jugement des critiques, après un événement militaire, n'est donc pas dans l'essence même de l'acte que la propagande évoque.

 

En revenant ainsi à l'étymologie du mot propagande, on fait mentir la définition que Régis Dubois, essayiste français se spécialisant dans l'idéologie au cinéma, nous donne du film de propagande : « Rappelons que par « film de propagande », nous entendons les films qui ont pour vocation de servir le pouvoir en place en manipulant (« endoctrinant », « embrigadant ») les foules ». La définition est pour le moins restrictive. Ne concevoir le film de propagande, certes film mais de propagande tout de même, que comme un service au pouvoir dans le but de manipuler les foules est une vision disons sélective.

A la lumière de l'étymologie même du mot propagande et d'une analyse des films de propagande, on ne peut que concevoir une définition élargie du film de propagande, une définition qui fait mentir Régis Dubois. De cette analyse de films, une typologie. Une première typologie, avec tout ce que cela comprend comme la possibilité de la critiquer, améliorer ce cadre. Car il s'agit bien d'un cadre. Nécessaire pour poser des balises modifiables par la suite, après des études précises. Pas de progression sans point de départ.

L'idée de typologie me semble nécessaire puisqu'en s'intéressant aux différentes documentaires français sur le sujet, L'Histoire mondiale du film de propagande, La Projection nationale..., on s'aperçoit d'un traitement de la notion même de « film de propagande » dense et sans nuance. Il y a le film de propagande, traité par pays, par type de propagande. Mais rien que le film de propagande.

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Pourtant, si l'on prend la peine de se pencher sur ce type de film, on constate des tendances renvoyant à des formes, des idéologies, les unes aux services des autres. Du fait de ces tendances, on ne peut alors que constater que le film de propagande est à considérer plus largement que le fait Régis Dubois. De la propagande au service d'un pouvoir politique certes, mais pas seulement. C'est ce que nous verrons dans le prochain billet avec l'ébauche d'une première typologie des films de propagande.